Un trio de choc à vélo sur la côte Pacifique costaricainne
Avec le départ du Tilou, nous voilà réduit à 3 personnes et 3 vélos, cette fois il n’y a plus d’excuses pour flâner. José, le frère de Tita, nous emmène visiter ses cultures de café sur les coteaux de Santa Maria de Dota. L’altitude et l’influence des deux océans en font un terroir réputé pour la fraîcheur et la complexité aromatique de ses cerises de café. José mène ses caféiers en culture raisonnée, à savoir quelques arbres pour lutter contre les maladies et procurer de l’humus complété par quelques passages d’herbicides (comme en témoigne son tee-shirt) ! La période des récoltes manuelle dure 9 mois et les panaméens émigrent sur place annuellement. Dans cette appellation de qualité, seulement une minorité travaille en café biologique.
Tita nous propose de la suivre jusqu’à la maison d’un couple hindou
costaricain. Elle nous a pris pour des cyclistes professionnels car les 7
kilomètres de montée nous paraissent l’étape de l’Alpe d’Huez ! Cela
permettra néanmoins de déceler que Florent n’a pas encore la forme des
cousins...
Le lendemain c’est une autre histoire, nous partons avec toute notre charge
pour une montée de 14 kilomètres. Effort intense qui mettra en valeur que si
les caisses en bois de Pancho sont esthétiques, elles ne sont pas si
pratiques ; le bougre doit faire bien plus d’efforts pour atteindre la panaméricaine !
Nous prenons la direction de l’extrême Sud du pays afin d’atteindre le parc
national Corcovado, le mieux préservé du Costa Rica. Le premier bus pour San
Isidro fait de nombreux efforts pour embarquer nos vélos, le suivant pour la
péninsule Corcovado en profite pour nous faire payer un montant exorbitant. Les
aléas de l’humain. Le croisement est un peu déprimant pour camper, nous
profiterons du jardin d’un cycliste curieux de notre trio à vélo.
Après un « Gallo Pinto » costaud (riz et haricot noir mélangés,
le plat typique national disputé avec le Nicaragua), nous enfourchons nos
bécanes sous un soleil brûlant. La route est vallonnée et nos soucis du premier
jour se confirme, Florent voit des étoiles et a une petite "fringalle"
qui nous obligera à l’alimenter de bananes, coca-cola et biscuits.
La route est
magnifique surplombant le « Golfo Dulce ». Nous nous baignons,
profitons d’un "ceviche" et de poissons grillés (il ne manque que le blanc
frais !).
En fin d’après-midi nous atteignons Puerto Jimenez où les bières
les pieds dans l’eau sont un régal. Nous campons sur un coin de plage devant un
hôtel qui nous laissera utiliser sa douche extérieure.
Un petit déjeuner copieux devant la boulangerie et séjour chez les mécanos
pour les vélos des cousins : François fixe ses caisses et je répare les
fixations de mes mallettes. Le mécano refusera que l’on paie quoi que ce soit
et nous provisionnera d’oranges pour la route, notre périple le laisse rêveur.
Nous nous approvisionnons en nourriture afin de camper dans le parc et Pancho
se fera un nouvel ami qui insistera pour nous recevoir chez lui. Il habitait
Puerto Jiménez et a décidé d’émigrer dans la jungle en achetant une ferme. Nous
sommes impressionnés par ses compétences en agriculture pour un néo
fermier ! Il cultive et élève tout ce qu’il mange excepter le riz. Nous
passons la soirée à échanger avec sa famille dans sa modeste bicoque en bois.
C’est chargé de bananes saveur clou de girofle que nous nous rendons à la
station des gardes forestiers « Los Patos ». Un jeune volontaire
belge se joint à nous pour notre excursion en forêt où nous connaîtrons un ours
fourmilier comique... Ayant une faible vue, il descend de son arbre et
lorsqu’il nous aperçoit remonte en vitesse, et ainsi de suite toutes les 5
minutes !
Nous croiserons le premier singe capucin pour Florent et une
colonie de Toucans qui nous émerveilleront par leur chant et leurs
sautillements latéraux mais surtout par leur plumage et bec coloré.
L’excursion matinale offrira une faune plus active avec de nombreux oiseaux
et des singes se nourrissant de jeunes pousses d’arbres. Nous quittons le parc
en restant perplexe de ce jeune volontaire qui doit payer pour faire un travail
ingrat (toilettes, balais, râteau...). Cela faisait 10 jours qu’il était sur
place et il n’avait toujours rien vu de la réserve. Il y a quelques jeunes qui
gardent le sens du travail ! L’essentiel est qu’il avait l’air content de
sa situation.
La prochaine étape est de se rendre à Durika, communauté de personnes ayant choisies une vie plus harmonieuse avec la nature. Le bus nous dépose à Buenos Aires où l’association coordinatrice des minorités indigènes nous offre un toit. Nous cuisinons un riz ananas au curry à mentionner tellement il nous a régalé ! A l’aurore, nous partons pour l’ascension de Durika alors que tout le monde nous a répété que c’est impossible en vélo... La première partie est pentue, tellement pentue qu’il est obligé de mettre parfois le pied à terre, mais nous atteignons la fontaine sans trop de dommages. Il ne reste plus que 3 kilomètres et ... 900 mètres de dénivelés ! Le chemin de terre étant clairsemé de grosses pierres il est impossible de faire plus de 10 mètres sans déraper. Nous improvisons des défis afin de dépasser les quelques mètres sans pause et c’est certainement ce qui a sauvé le moral des 3 grandes gueules que nous sommes. En effet nous nous prenons au jeu et oublions parfois jusqu’à 20 mètres que nos jambes brûlent... Nous arrivons trempés de sueur à l’entrée de la communauté où Annie, une française nous attend avec un remontant : jus de rose de Jamaïque, thé d’ananas et pain d’épices maison. L’endroit est superbe, la nourriture végétarienne excellente et nous passons l’après-midi à nous imprégner de cette vie harmonieuse. L’atelier de plantes naturelles et de fabrication de savon nous marquera, tant d’odeurs et de couleurs si riches ! Le cabinet médical nous apprendra que François reste le plus gros du trio avec ses 82 kilos, Florent n’a jamais été aussi gros à 81 kilos et moi jamais aussi maigre à 67 kilos ! Ma nouvelle silhouette me permettra de grimper les 35 mètres d’un figuier étrangleur. Arbre qui grandit en entourant et étouffant un autre arbre en son centre qui une fois mort et pourri forme un tunnel. La cime offre une jolie vue sur la vallée dont le Pancho bloqué à l’intérieur ne pourra pas profiter.
Les travaux du village se gèrent en communauté et un organisateur mensuel
répartis les taches entre les villageois : cuisine, service, potager, chèvres,
entretien des chemins, etc. Les vices type alcool, café, cigarettes, viandes
sont prohibés excepté les jours de fête. La nourriture est répartie à chaque
chef de famille mensuellement. Tout cela est fascinant mais bien trop
contraignant et bien pensant pour nous. Et surtout isolé en dehors de la
« vraie vie ». Mais il faut reconnaître que toutes les générations
vivent en harmonie, que les gens sont épanouis et en bonne santé. Il faut peu
de choses pour bien vivre !
On choisit de retourner sur Santa Maria, retrouver Tita et passer une
dernière bonne soirée tous les trois. On descend du bus au niveau de la panaméricaine
afin de connaître la troisième et dernière route qui mène au village. La
descente à travers le Parc National Quetzal est magnifique mais la route est en
très mauvais état et le Quetzal ne veut pas se montrer. C’est tout de même
inquiétant car nous sommes descendus énormément et il va bien falloir remonter
le dénivelé afin de rejoindre la vallée des Saints de Dota... En effet, la
montée est très pentue et nous jetons nos dernières forces toute l’après-midi.
Le problème est que cela n’en finit pas, que la pente devient plus abrupte et
que nous ne valons plus grande chose physiquement en cette fin de journée.
Après 9 heures de vélo, nous finirons à la lampe torche sans eau et sans
nourriture. Et nous qui pensions assister au rodéo de l’après-midi, merci
Florent pour cette initiative ! Vexé de ses premières performances à vélo
il a sans doute voulu montrer aux cousins qu’il lui restait le panache... Ca
restera un souvenir fort.
Tita nous accueille à bras ouverts et nous emmène à la Feria qui s’avèrera bien moins intéressante que son saloon ou nous terminerons la soirée par une Pilsen de contrebande au comptoir (il est plus d’une heure du matin et il est interdit de vendre des bières).
L’effort de la veille nous convainc de faire une pause, après tout nous
sommes dimanche ! Nous assisterons cette fois aux jeux de taureaux dans
l’arène où le plus intéressant sera de voir le cousin descendre défier le taureau
avec l’animateur le présentant comme un toréador amateur...
Nous rentrons pour
une soirée crêpe pour nos ôtes qui se prolongera pour le trio par une soirée
rhum à faire et défaire le monde.
Nous nous séparons de Pancho à San José qui va reprendre la route depuis Léon
au Nicaragua. Nous nous rendons à Zarcero, village pionnier de l’agriculture
biologique au Costa Rica.
Cette semaine de vélo a été bien physique et marquée par une super
dynamique du trio. Merci à vous deux pour votre énergie et tous ces bons
moments.